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L’azote : un élément clé pour le développement de l’agriculture biologique. Assurer la transition des systèmes agricoles pour garantir un niveau de production suffisant, de qualité, et durable est un enjeu majeur pour nos sociétés. Le développement de l’agroécologie repose sur plusieurs leviers dont l’agriculture biologique fait partie.
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Or, l’une des limites du développement du bio est la ressource restreinte en azote dans le sol, indispensable à la croissance des plantes. Cette variable n’a jusqu’à présent jamais été prise en compte dans les travaux explorant la possibilité de satisfaire la demande alimentaire mondiale par l’expansion de l’agriculture biologique. Une équipe de recherche d’INRAE et de Bordeaux Sciences Agro a développé un modèle simulant, à l’échelle mondiale, l’offre et la demande en azote des cultures pour de tels scénarios, excluant l’usage d’engrais azotés de synthèse. Leurs résultats, publiés le 13 mai dans Nature Food, montrent que le déploiement mondial de l’agriculture biologique peut être limité par la disponibilité en azote. Ils montrent également que, pour être soutenable, il doit s’accompagner d’une transformation des systèmes d’élevage, d’un rééquilibrage de l’alimentation humaine et d’une baisse importante du gaspillage alimentaire.
L’azote : un élément clé pour le développement de l’agriculture biologique
L’azote est un élément indispensable à la croissance et au développement des plantes cultivées qu’elles trouvent dans le sol et dont dépend la productivité agricole. En agriculture conventionnelle, cet élément est apporté par des fertilisants de synthèse qui sont interdits en agriculture biologique. La fourniture d’azote aux cultures en agriculture biologique repose essentiellement sur les fumiers issus de l’élevage et, dans une moindre mesure, sur la fixation de l’azote atmosphérique dans le sol, effectuée par les légumineuses. Cependant, ces deux sources ne sont pas infinies ni inépuisables. Représentant aujourd’hui environ 8% de la production agricole française, et moins de 2% à l’échelle mondiale, le développement de l’agriculture biologique à grande échelle pose des questions majeures à la recherche : son développement pourrait–il être limité par la disponibilité en ressources azotées compatibles avec le cahier des charges de l’agriculture biologique ? Et cette disponibilité limitée est-elle susceptible d’avoir des impacts sur le rendement des cultures et la sécurité alimentaire mondiale ?
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Pour répondre à cette question, les scientifiques d’INRAE et de Bordeaux Sciences Agro ont mis au point un modèle qui simule l’offre et la demande en azote des cultures agricoles en fonction de différents scénarios de développement de l’agriculture biologique à l’échelle mondiale : scénarios de 20, 30, 40%… jusqu’à 100% des cultures mondiales en agriculture biologique. Sur la base des pratiques d’élevage et de la consommation alimentaire actuels, leurs résultats montrent que le développement de l’agriculture biologique s’accompagne dans de nombreuses régions du monde d’un déficit marqué en azote et donc d’une baisse importante du rendement des cultures.
Agir sur les systèmes d’élevage et la demande alimentaire
L’élevage est indispensable au développement de l’agriculture biologique du fait de sa capacité à fournir de l’azote pour enrichir les sols grâce au fumier. Mais il faut un équilibre, car les animaux consomment également ce qui est issu des cultures et peuvent ainsi être en compétition avec l’alimentation humaine. Dès lors, il semble nécessaire de combiner plusieurs leviers dont la réduction du nombre global des animaux d’élevage, en particulier dans les élevages porcins et aviaires qui sont en compétition directe avec l’alimentation humaine car principalement nourris avec des céréales, et la relocalisation des élevages de ruminants au plus près des cultures, notamment dans les prairies, pour reconnecter productions végétales et animales et optimiser le recyclage de l’azote.
En rééquilibrant la a consommation alimentaire mondiale et en réduisant le gaspillage alimentaire d’au moins 50%, il serait possible d’augmenter la part de l’agriculture biologique mondiale jusqu’à 60%.
Un des autres leviers serait de rééquilibrer la consommation alimentaire mondiale. En moyenne, elle est estimée à 2890 kcal par personne et par jour, alors que 2200 kcal seraient suffisant. Ce rééquilibrage passerait par une baisse de la consommation alimentaire moyenne dans les pays développés (consommation d’environ 3000 kcal en Europe et Amérique du Nord) accompagnée d’une augmentation dans les pays en voie de développement, notamment en Afrique. Enfin la réduction du gaspillage alimentaire d’au moins 50% serait incontournable.
En agissant sur ces points, il serait possible d’augmenter la part de l’agriculture biologique mondiale jusqu’à 60% au moins tout en répondant à la demande alimentaire mondiale. Les scientifiques explorent actuellement d’autres pistes pour développer l’agriculture biologique comme l’augmentation de la part des cultures de légumineuses, qui fixent l’azote d’origine atmosphérique dans le sol, et qui pourraient être valorisées dans l’alimentation humaine et des élevages.
Référence :Pietro Barbieri, Sylvain Pellerin, Verena Seufert, Laurence Smith, Navin Ramankutty, Thomas Nesme. Global option space for organic agriculture is delimited by nitrogen availability. Nature Food 2021 DOI : 10.1038/s43016-021-00276-y
Crédit/Source : Service de presse INRAE