Légalisation du cannabis : l’Académie de Médecine dit non


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CC0 Public Domain /Pixabay
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La légalisation du cannabis, ou plutôt sa dépénalisation, est un débat qui fait rage depuis plusieurs années déjà. Si certains pays ont déjà franchi le pas, médecins et politiques français ont bien du mal à se mettre d’accord sur le sujet. Et alors que les avis sont particulièrement tranchés sur la question, le célèbre pneumologue français Bertrand Dautzenberg a créé la surprise début février en appelant à dépénaliser le cannabis. Estimant que la lutte contre la consommation de cannabis était un échec, il a lancé un appel pour un assouplissement de la législation actuelle.

Oui mais du côté de l’Académie de Médecine, le message ne passe pas. Dans un communiqué publié fin avril, les sages de l’Académie ont réitéré leur opposition  à  un tel projet .  Selon eux ce serait  un  très  mauvais  message  adressé  à  la  jeunesse  de  notre  pays  et  ses  conséquences seraient  catastrophiques en  terme  de  santé  publique,  spécialement  dans  notre  pays  caractérisé  par  une  consommation record en Europe.

Puis de préciser qu’en France, entre 1993 et 2014, la concentration moyenne de son principe actif, le tétrahydrocannabinol (THC), a considérablement augmenté (multipliée par 5) pour atteindre 20 % dans la résine de cannabis et 13 % dans l’herbe.

Puis de mettre en garde contre ceux qui font de cette augmentation des teneurs un argument pour la dépénalisation mettant en avant qu’elle sera contrôlée dans les produits vendus légalement. Pour l’Académie, il n’en est rien puisque dans les pays qui l’ont adoptée, il est constaté une expansion de l’autoculture qui n’est jamais contrôlée.


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Entre autres arguments, les sages avancent que :

– Le cannabis est de plus en plus accidentogène sur les routes de France du fait de ses effets sur les fonctions cognitives et motrices
– Le cannabis eut perturber gravement la maturation cérébrale entre 12 et 20 ans. Modifiant les connexions entre les neurones, il peut déterminer des troubles délirants, hallucinatoires, cognitifs qui sont des manifestations caractéristiques de la schizophrénie.
– Le cannabis eut entraîner, en cas d’usage régulier, des troubles anxieux importants, une dépression avec des risques suicidaires, un fort déclin des performances « scolaires » avec une diminution irréversible du Quotient Intellectuel (QI), l’escalade vers d’autres drogues à l’origine de polytoxicomanies.
– Le cannabis peut entraîner diverses complications vasculaires touchant le cœur (infarctus), le cerveau (accident vasculaire) et les membres inférieurs (artérite)
– Sa fumée possède un pouvoir cancérogène supérieur à celui du tabac.
– Le cannabis diminue la libido et la fertilité masculine.
– Dans les pays ayant légalisé l’usage du cannabis, le constat est catastrophique (banalisation du produit, augmentation du nombre d’usagers; augmentation du nombre de personnes dépendantes; augmentation du risque de passer à d’autres drogues plus dures encore; augmentation du nombre d’hospitalisations pour intoxications aiguës et chroniques ; augmentation du nombre de cas d’ingestion accidentelle par des enfants; augmentation du nombre d’accidents de la route liés au cannabis….

Pour toutes ces raisons l’Académie de Médecine estime que la légalisation du cannabis serait la pire des solutions à adopter pour lutter dans notre pays contre ce fléau destructeur.

Et de rajouter qu’à l’heure où l’on mène campagne contre le tabagisme, la légalisation de l’usage du cannabis serait « irresponsable ».

Le saviez-vous ? Hausse des signalements d’intoxications pédiatriques au cannabis

L’occasion de revenir sur l’alerte lancée à l’automne dernier par l’agence française du médicament relative à la sous-estimation des dangers liés à l’ingestion de cannabis et sur la gravité de ces intoxications qui conduisent très souvent à une hospitalisation de plus de 24 heures. Pourquoi ? En raison d’une hausse significative des signalements d’intoxications pédiatriques au cannabis observée en France depuis l’an dernier, des intoxications qui touchent principalement les enfants de moins de 2 ans.

Pour mieux comprendre, voici une brève analyse des données disponibles

Au total, le réseau d’addictovigilance a rapporté 140 notifications  d’intoxications pédiatriques au cannabis entre 2010 et 2014, dont 59 pour la seule année 2014. La grande majorité concerne des enfants de moins de 2 ans. Parmi ces notifications, 120 ont débouché sur des hospitalisations de 24 heures ou plus, avec 9 cas graves, correspondant à des situations ayant mis en jeu le pronostic vital et entraîné une admission en réanimation pédiatrique ou en soins continus. L’évolution de ces cas a été favorable et à ce jour aucun décès n’a été rapporté. Les manifestations cliniques décrites ont été des troubles cardiaques, ventilatoires et neurologiques.

Les données de la base nationale du PMSI ont également montré une augmentation du nombre d’hospitalisations en relation avec le cannabis chez les enfants de moins de 10 ans, majoritairement chez les moins de 2 ans, avec 615 cas, survenus principalement en 2013 (151 cas) et 2014 (247 cas). On observe une forte disparité régionale, les zones les plus touchées étant l’Ile-de-France et celles du sud (PACA, Rhône-Alpes).

Les investigations ont montré que les intoxications surviennent le plus souvent dans un cadre familial ou au sein de l’entourage proche.

Cette hausse des intoxications pédiatriques se fait en parallèle de l’augmentation de la consommation de cannabis dans la population générale et sans doute également de celle des teneurs en tétrahydrocannabinol (THC) du cannabis qui sont de plus en plus élevées. Les moyennes des teneurs en THC ont ainsi été multipliées par 3 environ depuis 15 ans pour atteindre, en 2013, 17,4 % dans la résine et 12,6 % dans l’herbe.

A l’échelle internationale, cette augmentation des intoxications pédiatriques au cannabis semble être observée en Espagne, aux Etats-Unis, au Maroc, en Israël et en Italie.

Ce que préconise l’ANSM

Au vu de ces résultats, l’ANSM attire l’attention des professionnels de santé et du grand public sur les risques que présente l’ingestion de cannabis par le nourrisson ou l’enfant.

En cas d’ingestion ou de suspicion d’ingestion de cannabis, les structures d’urgences (Samu Centres 15) doivent être immédiatement prévenues. Les principaux signes cliniques retrouvés au cours d’une intoxication aiguë au cannabis peuvent être une somnolence avec des phases d’agitation, des vomissements, des tremblements, des convulsions, une détresse respiratoire, voire un coma.

L’ANSM invite également les professionnels de santé, devant des troubles neurologiques ou respiratoires inexpliqués chez un enfant ou un nourrisson à faire effectuer une analyse toxicologique pour rechercher la présence de cannabis.

L’ANSM rappelle qu’en vertu de l’article L3421-1 du Code la santé publique la consommation de cannabis est interdite en France.

Crédit Source : ANSMAcadémie de Médecine