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La journée mondiale du refus de la misère qui s’est déroulée en ce samedi 17 septembre 2015 a été l’occasion pour Médecins du Monde se rendre public son rapport annuel (le 15ème nom) relatif à l’accès aux droits et aux soins des plus démunis en France. L’occasion également de présenter son exposition « OUVRONS LES PORTES, Regards sur la migration ».
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Depuis trente ans Médecins du Monde dénonce les inégalités de santé qui touchent les plus démunis en France. Son nouveau rapport est accablant. Basé sur les 40 000 consultations médicales réalisées dans nos 20 Centres d’accueil de soins et d’orientation en 2014, il témoigne cette année encore des difficultés persistantes rencontrées par les personnes en situation de précarité pour se faire soigner.
Plus de 98% des patients reçus dans les centres de soins de Médecins du Monde en 2014 vivent en dessous du seuil de pauvreté.
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Plus de 2/3 ne disposent pas d’un logement stable et 1/4 ne possèdent aucune ressource.
Cette fragilité a des conséquences sur l’état de santé des personnes. Plus de la moitié d’entre elles souffrent d’une pathologie chronique, potentiellement grave en l’absence de prise en charge. Près de 40 % présentent un retard de recours aux soins.
Face à une population toujours plus fragilisée, Médecins du Monde se mobilise sur 3 enjeux principaux, pour renforcer la lutte contre TOUTES les précarités et pour l’accès aux soins de tous.
L’urgence de la prise en charge des migrants
Calais, symbole de l’insuffisance des pouvoirs publics
Depuis 2003, MdM se mobilise dans la région Nord-Pas-de-Calais pour faciliter l’accès aux soins des personnes en transit migratoire et améliorer leurs conditions de vie.
Au cours de l’année 2014, plus de 2 000 consultations médicales ont été réalisées auprès des migrants sur les camps de Grande-Synthe, Téteghem et Tatinghem. En 2014/2015, notre mobilisation s’est intensifiée à Calais où la situation devient de plus en plus alarmante. Les migrants sont aujourd’hui plus de 4 000 à vivre dans des conditions sanitaires déplorables sur le site d’une ancienne décharge. Depuis le mois de juillet, face à l’absence de réponse adaptée du gouvernement et face à l’ampleur des besoins vitaux, Médecins du Monde a développé avec d’autres associations une opération d’urgence à l’image de ce qui peut être fait à l’international sur les zones de catastrophes naturelles ou de conflits. Plus de 3 200 consultations médico-sociales et psychologiques ont déjà été proposées. De nombreuses prises en charge psychologiques ont été effectuées en raison de l’augmentation des besoins.
Les mineurs isolés étrangers, victimes de la mauvaise gestion des pouvoirs publics
En 2014, plus de3 700 mineurs ont été accueillis dans nos Caso, soit 13,8 % des patients rencontrés.Leur nombre a quasiment doublé en 8 ans. On observe un retard de recours aux soins pour plus d’1/4 d’entre eux.Comme le prévoient les conventions ratifiées par la France, les mineurs, quelle que soient leur situation et leur nationalité, devraient accéder à une couverture maladie, inconditionnellement et sans délai. Orseuls 9 % des jeunes disposent de droits ouverts lorsqu’ils sont reçus pour la première fois dans un Caso.
Le nombre de mineurs isolés (MIE) reçus dans nos centres a été multiplié par 8 depuis 2001 et s’élève à 517 en 2014. Le cas des MIE est symptomatique de politiques qui mettent davantage l’accent sur les dimensions sécuritaires que sur la protection de l’enfance. Pour évaluer leur âge, ces jeunes sont souvent soumis à des examens médicaux (examen dentaire, de maturation osseuse, tests de maturité sexuelle…), peu fiables dont les résultats concluent rarement à la minorité et les excluent des dispositifs de droit commun.Médecins du Monde dénonce l’utilisation de ces tests inappropriés.
L’insuffisance des politiques de lutte contre la pauvreté pour tous les précaires
Un projet de loi de santé insuffisant pour les plus précaires
Malgré des progrès comme la généralisation du tiers payant ou l’expérimentation de salles de consommation de drogue à moindre risque, le texte du projet de loi de santé reste en-deçà des enjeux d’accès aux soins et aux droits. Il ne sécurise pas assez les structures de soins de premier recours (PMI, centres de santé, Pass…) dont beaucoup sont en difficulté voire menacées, alors qu’elles sont essentielles.
Dans le domaine de la prévention, le texte ne prévoit rien sur les dispositifs pour aller à la rencontre des populations les plus déshéritées, dont l’efficacité est pourtant démontrée. De même, il néglige les efforts nécessaires en matière de médiation sanitaire et d’interprétariat professionnel. La question de l’aide médicale d’état (AME) est également absente du texte.
La nécessaire fusion de l’AME dans la CMU
Parmi les patients rencontrés en 2014,80 % ont des droits théoriques à la couverture maladie au jour de leur 1ère visite, pourtant seuls 15 % ont effectivement des droits ouverts. La précarité sociale, administrative, et la barrière de la langue auxquelles sont confrontés nos bénéficiaires constituent de vrais obstacles à une bonne prise en charge. La fusion des dispositifs de l’AME et de la CMU permettrait un accès aux soins plus simple, moins stigmatisant, et serait garante d’une politique de santé publique efficace.
Des populations en difficulté dans les zones rurales
Les espaces ruraux sont loin d’être épargnés par la précarité. Peu visible, elle attire moins l’attention des politiques publiques.
Depuis mai 2013, Médecins du Monde a mis en place en Auvergne un dispositif qui accompagne les personnes vulnérables en milieu rural. A ce jour,plus de 300 consultations sociales, plus de 100 consultations de santé(médicales, infirmières, psychologiques) et plus de 100 accompagnements physiques vers des structures de droit commun ont été effectués.
Bien qu’une grande majorité des personnes rencontrées ait des ressources financières, elles déclarent pour la plupart rencontrer des difficultés et se sentir isolées.Près de 50 % d’entre elles déclarent avoir déjà renoncé à des soins alors que la majorité a au moins un problème de santé et considère son état de santé comme mauvais ou médiocre.
D’après une étude menée auprès d’agriculteurs, 1/4 présenterait une détresse psychologique. Pour rappel, le suicide est la troisième cause de mortalité chez les agriculteurs en France [1]. Parmi les personnes interrogées, 14 % ont déclaré avoir renoncé à consulter un médecin et près de 20 % un spécialiste au cours des 12 derniers mois.
La nécessaire promotion de la démocratie sanitaire
Un débat sur le prix des médicaments à instaurer
Les nouveaux traitements que sont les antiviraux à action directe (AAD) permettent une amélioration considérable de la prise en charge de l’hépatite C. Ils offrent ainsi une opportunité exceptionnelle d’éradiquer le virus. Mais leur prix, excessivement élevé, vient déséquilibrer les systèmes de santé, y compris ceux qui sont considérés comme les plus performants. À ce jour, les indications de traitement concernent seulement les personnes les plus gravement malades en France. Ce rationnement se traduit de fait par une sélection inacceptable des malades ayant accès aux traitements.
En 2015, Médecins du Monde s’est engagé sur le terrain juridique pour dénoncer ces prix exorbitants en déposant un recours d’opposition au brevet du sofosbuvir devant l’Office européen des brevets (OEB). C’est la première fois en Europe qu’une ONG médicale utilise cette voie pour défendre l’accès des patients aux médicaments. Cette démarche vise à provoquer un débat public sur les mécanismes de fixation du prix des médicaments. La volonté de transparence que sous-tend ce combat relève d’une réaffirmation et d’un renforcement nécessaire du principe de démocratie sanitaire.
Face à ces constats, Médecins du Monde appelle donc les pouvoirs public à refuser de mettre les précarités en concurrence.La crise migratoire à laquelle est confrontée actuellement l’Europe exige une mobilisation supplémentaire de moyens. Cela doit provoquer en France une nécessaire prise de conscience des autorités et une évolution des politiques publiques de solidarité, jusque-là insuffisantes.
Il faut se saisir de ce phénomène historique pour renforcer la lutte contre TOUTES les précarités et pour l’accès aux soins de tous. L’Etat se doit de prolonger la mobilisation citoyenne qui anime aujourd’hui la société française.
Médecins du Monde exige aujourd’hui des autorités :
•L’amélioration de l’accueil inconditionnel des migrants pour : ◦offrir des conditions d’accueil décentes : les migrants doivent être correctement informés et exercer sereinement leurs droits, notamment celui de demander l’asile et de répondre à leurs besoins vitaux.
◦ouvrir des voies d’accès légales et sûres pour que les personnes qui le souhaitent, sans discrimination, puissent rejoindre l’Europe sans avoir à risquer leur vie et sans avoir recours à des passeurs.
•Une amélioration des politiques de lutte contre la pauvreté pour les plus précaires avec notamment la fusion de l’AME et de la CMU et le renforcement des structures de droit commun dans les zones oubliées, dont les espaces ruraux.
•Un débat sur la fixation du prix des médicaments pour assurer une démarche de transparence.
« La précarité n’est ni une fatalité ni un choix pour ceux qui la vivent. Elle ne doit ni faire peur, ni diviser, elle doit être la source d’un élan d’humanité » déclare le Docteur Françoise Sivignon, présidente de Médecins du Monde
EXPOSITION « OUVRONS LES PORTES, Regards sur la migration »
Place de la République du 15 au 18 octobre
L’exposition conçue par Médecins du Monde, propose de découvrir le portrait de personnalités connues ou non qui expriment un regard solidaire sur la migration.
L’EXPOSITION
Ils sont comme vous et nous.
Venus de partout. De là-bas, d’ici.
Ils ont tous les âges, tous les genres, toutes les conditions, toutes les cultures.
Ils partagent une même conviction. Le monde est plus beau, la vie est plus belle, plus riche, plus intéressante, plus humaine, quand les portes sont ouvertes ou s’ouvrent à l’autre.
Cette exposition, organisée par Médecins du Monde en appui aux programmes d’aide et de soutien que l’association mène partout au service des plus vulnérables, leur donne la parole.
C’est une parole de solidarité, un antidote contre la peur et la haine.
Ouvrons nos portes !
SAMUEL LUGASSY
Au début des années 2000, Samuel Lugassy se lance en autodidacte dans la photographie. Très vite, il se dirige vers le portrait et collabore avec différents titres de presse pour lesquels il photographie de nombreux artistes de musique et de cinéma. En 2010, il entreprend un travail personnel sur l’identité : ses deux premières séries réalisées en Lituanie et en Moldavie ont pour sujet les gens de la campagne. Sa série « Gymnast & Wrestler », réalisée en Bulgarie en 2013, a été exposée lors de plusieurs festivals européens et a été primée en 2015 lors du festival Sportfolio.
•Lire le rapport ou la synthèse de l’Observatoire
•Voir l’exposition
[1] Bossard C, Santin G, Guseva Canu I. “Surveillance de la mortalité par suicide des agriculteurs exploitants- Premiers résultats», InVS , rapport, 2013, 27 pages.